Entreprises en difficultés, quelles actions anticiper ?

Publié le 8 min
Ecrit par Jean-Philippe Besnier

Comme l’huile sur le feu, la trésorerie de l’entreprise doit être constamment surveillée de près. Lorsqu’elle ne permet plus de régler les dettes (emprunts et découverts bancaires, avances en compte courant d’associés, dettes fournisseurs, sociales et fiscales), l’entreprise doit réagir. Aux premières loges pour trouver l’origine de ces difficultés de trésorerie, votre expert-comptable est un allié précieux. Qu’il s’agisse de décalages ou d’impayés de paiement, de sous-activité de l’entreprise… il convient de réagir vite pour trouver les correctifs adaptés. Compta Facile revient sur la démarche à suivre : de la détection des difficultés à la notion de cessation des paiements et ses conséquences ainsi que les moyens d’actions préventifs ou curatifs à la disposition de l’entreprise.

Entreprise en difficultés

La détection des difficultés

Il est dans un premier temps, nécessaire de rappeler une règle d’or : plus les difficultés sont détectées à temps, plus l’entreprise aura des chances de les surmonter.

Une seconde condition en découle : la comptabilité de l’entreprise doit être suivie et mise à jour très régulièrement. Celle-ci permet effectivement de tirer des informations précieuses sur le fonctionnement de l’entreprise. Idéalement des tableaux de bord d’activité, des situations comptables et des suivis de trésorerie peuvent donner des informations encore plus récentes.

Dans le cas où les indicateurs comptables et financiers indiquent des résultats négatifs, des difficultés de trésorerie peuvent survenir dans la foulée (sauf dans le cas où l’entreprise avait accumulé des réserves importantes permettant d’absorber ces pertes). Il convient alors dans ce cas, d’analyser les raisons de ces pertes, de les comprendre et d’y remédier. Dans ce cas, un travail sur les marges, les ratios de frais généraux et les ratios de charges de personnel doit être effectué afin de viser un équilibre d’exploitation. Parallèlement, il est important d’anticiper les difficultés de trésorerie avec l’un des moyens préventifs ou curatifs exposés ci-dessous.

Mais l’entreprise peut également connaître des difficultés de trésorerie sans connaître des résultats d’activité négatifs : autofinancements d’investissements, impayés de créances clients, retards de paiements clients, surstockage, développement important.

Il est important de collecter toutes ces informations afin de bien analyser l’origine des difficultés et d’essayer d’y apporter les bonnes réponses.

Dans ces moments, le chef d’entreprise se sent souvent seul et démuni ; il cherche du soutien et des informations sur les moyens pouvant aider à surmonter les difficultés de trésorerie. Les conseils habituels de l’entreprise que sont l’expert-comptable et l’avocat, ainsi que dans un autre registre, le commissaire aux comptes (à travers la procédure d’alerte) ont tous un rôle important de détection et de prévention des difficultés. Il arrive cependant que les relations soient coupées ou distantes.

Il existe alors des structures qui accueillent les chefs d’entreprise afin de les écouter et de leur exposer des solutions adaptées à la nature de leurs difficultés. Parmi ces structures, la cellule de prévention du Tribunal de Commerce, ainsi que le CIP (centre d’information et de prévention sur les difficultés des entreprises) sont disponibles à cet effet. Les rendez vous sont privés, gratuits et confidentiels.

La notion de cessation des paiements

Avant d’envisager telle ou telle solution il est toujours important d’essayer de statuer sur un éventuel état de cessation des paiements de l’entreprise qui connait des difficultés de trésorerie. La cessation des paiements est l’impossibilité de faire face aux passifs exigibles avec les actifs disponibles. Or une entreprise peut connaître des difficultés de trésorerie sans pour autant être en état de cessation des paiements.

La qualification d’une éventuelle cessation des paiements est importante car elle détermine et/ou restreint les actions possibles à mettre en place. Cet exercice est délicat car tout dépend de la position des créanciers de l’entreprise. En effet, pour simplifier, une même dette peut être exigible ou exigée.  La cessation des paiements va entraîner automatiquement l’entreprise en difficultés dans l’une des trois procédures suivantes : conciliation, redressement judiciaire ou liquidation judiciaire (développées en fin d’article). Hormis la procédure de liquidation judiciaire, qui constate la disparition de l’entreprise faute de possibilités d’amélioration, les deux premières procédures doivent être considérées comme une chance pour l’entreprise en difficultés de régulariser ses paiements et de poursuivre son activité.

La cessation des paiements entraîne le dépôt au greffe du Tribunal de Commerce d’une déclaration de cessation des paiements, ou « dépôt de bilan ». Celle-ci doit intervenir dans les 45 jours de l’état de cessation des paiements.

Lorsque la cessation des paiements est avérée, il est fortement conseillé de ne pas attendre. Plus le problème est pris tôt, plus l’entreprise en difficultés aura des chances de redresser sa situation. De même, il est conseillé d’aborder cette période avec un peu de trésorerie, (quitte à ne pas payer certains créanciers) ainsi que des stocks. Il est également important de rappeler que malgré les difficultés de trésorerie, l’entreprise se doit d’être à jour de la part salariale de ses cotisations sociales.

Enfin, rappelons que la période suspecte est la période antérieure à la date de cessation des paiements. Celle-ci est examinée attentivement par le Tribunal, en vue de remettre en cause certaines opérations éventuellement frauduleuses qui auraient pu être organisées avant la cessation des paiements. Il faut, en effet, être vigilent et prudent dans toutes les opérations réalisées entre la société et les dirigeants, associés, clients et fournisseurs pendant cette période, et veiller à leur régularité.

Difficultés de trésorerie : les moyens préventifs et curatifs existants

La négociation directe avec les créanciers :

Le premier moyen de surmonter des difficultés de trésorerie est évidemment de trouver des accords à l’amiable avec ses créanciers (fournisseurs, banques, organismes sociaux et/ou fiscaux) en échelonnant les sommes dues.

La CCSF (la Commission des Chefs des Services Financiers) :

C’est une commission que l’entreprise peut solliciter en vue d’essayer de trouver un accord pour ses dettes sociales et fiscales.

La médiation du crédit :

La médiation du crédit est un dispositif qui a été mis en place dans le but d’essayer de résoudre les difficultés financières liées à l’endettement bancaire (difficultés de remboursement des emprunts bancaires, découverts etc.). Un dossier permet à l’entreprise d’exposer ses difficultés. Au cours de cette démarche, l’expert-comptable de l’entreprise est invité à accompagner son client dans cette recherche de solution vis-à-vis des organismes bancaires.

Les procédures amiables :

Au nombre de deux, les procédures amiables (le mandat ad’hoc et la conciliation) sont des procédures discrètes, limitées dans le temps et qui permettent avec le concours d’un mandataire ou d’un conciliateur d’essayer de trouver un accord ou des délais de paiement avec tel ou tel créancier.

Les procédures collectives :

Au nombre de trois (sauvegarde, redressement judiciaire et liquidation judiciaire), les procédures collectives ont pour effet de bloquer et geler l’ensemble des dettes de l’entreprise. Les procédures sont collectives, c’est-à-dire que l’ensemble des créanciers sont collectivement mis au courant des difficultés financières de l’entreprise. Avant l’étape finale de la liquidation judiciaire, les deux premières procédures permettent à l’entreprise de sortir de ses difficultés, au moyen de l’élaboration d’un plan de sauvegarde ou de redressement.

Conclusion : Les difficultés de trésorerie d’une entreprise ne sont pas forcément une fatalité. Il est évidemment essentiel de pouvoir les expliquer rapidement pour mettre en place les solutions salvatrices. Celles-ci sont autant de chances de rebondir. Dans tous les cas, une règle d’or à retenir : plus les difficultés sont détectées tôt et plus une solution est trouvée tôt, plus l’entreprise sera apte à rebondir.

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Ecrit par
Jean-Philippe Besnier

Diplômé en sciences éco à Nantes, puis de l'IGR/IAE Rennes et après 10 ans d'expériences au sein de divers cabinets d'expertise comptable et de commissariat aux comptes, Jean-Philippe Besnier devient expert-comptable en 2008 puis associé au sein de la société d'expertise comptable Amarris Groupe en 2009. Depuis 2019, il contribue régulièrement aux articles Compta Facile.

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