Comptabilité des sociétés commerciales : les obligations

Publié le 11 min
Ecrit par Thibaut Clermont

Les sociétés commerciales doivent tenir une comptabilité généralement complexe. Elles peuvent toutefois bénéficier, sous certaines conditions, de mesures d’allègement. Par « société commerciale », il convient d’entendre toute société considérée comme commerçante de par sa forme juridique (sont visées les SARL, EURL, SAS, SASU, SCA, SCS, SNC, etc.) ou son objet (lorsqu’elle effectue des actes de commerce). Compta-Facile recense ici toutes les obligations comptables des sociétés commerciales :

  1. Modalités d’organisation de la comptabilité
  2. Principes de tenue de la comptabilité
  3. Conditions d’établissement et de dépôt des comptes annuels
obligations comptables societes commerciales

Organisation de la comptabilité des sociétés commerciales

Les sociétés commerciales doivent organiser leur comptabilité d’une façon bien précise. Elles doivent respecter un certain nombre d’obligations minimales en la matière.

Faire arrêter les comptes par le dirigeant

Le dirigeant d’une société (le gérant d’une SARL/EURL/SNC ou le président d’une SA/SAS/SASU) se voit attribuer des responsabilités à différents niveaux en matière comptable et notamment pour ce qui concerne :

  • L’organisation de la comptabilité,
  • La tenue de la comptabilité,
  • Et l’établissement des comptes annuels.

Il demeure ainsi responsable de ces tâches, même s’il choisit de les déléguer à une personne de son choix. Par ailleurs, il doit produire une comptabilité régulière (c’est-à-dire respecter les dispositions prévues par la Loi), sincère (être de bonne foi) et donnant une image fidèle du patrimoine de l’entreprise et du résultat des opérations de l’exercice écoulé.

Rédiger un document sur l’organisation comptable

Lorsqu’il est nécessaire à la compréhension et le contrôle du système de traitement de l’entreprise, un document décrivant les procédures et l’organisation comptable doit être rédigé. Cet écrit ne concerne pas les petites entreprises ne comportant aucune particularité inhabituelle. En pratique, il peut toutefois être indispensable de le rédiger, ne serait-ce pour l’expert-comptable de l’entreprise (ou encore le commissaire aux comptes) afin qu’il puisse comprendre facilement les processus comptables applicables en interne.

Le contenu d’un tel document n’est précisé par aucun texte. Les instances comptables recommandent d’y insérer notamment les éléments suivants :

  • Organisation générale de l’entreprise (succinctement : forme, siège, capital, activité, chiffre d’affaires, organigramme…),
  • Présentation des intervenants internes et externes (expert-comptable, conseiller, commissaire aux comptes),
  • Organisation du service comptable (organigramme détaillé, fonctions des participants, plan de comptes de référence),
  • Processus de traitement des pièces comptable (réception, affectation, saisie et classement),
  • Description des systèmes comptables utilisés (centralisation classique « journal centralisateur-journaux auxiliaires » ou autre, logiciel utilisé),
  • Production des informations comptables (procédures d’inventaire suivies, documents sortis, responsable et fréquence),

Tenir des livres comptables obligatoires

Les sociétés commerciales doivent tenir deux livres comptables obligatoires, depuis le 1er janvier 2016 :

  • Un livre-journal

Le livre-journal contient tous les enregistrements affectant le patrimoine de l’entreprise (ou, autrement dit, les écritures comptables). Son contenu dépend de l’utilisation de journaux auxiliaires (achats, ventes, banques, opérations diverses, caisse, etc.). Si l’entreprise n’en utilise pas, le livre-journal contient tous les mouvements enregistrés au jour le jour de façon chronologique et selon le plan comptable. Si elle utilise différents journaux, le livre-journaux général ne reprend que la centralisation mensuelle des écritures contenues dans les journaux auxiliaires (les journaux auxiliaires, quant à eux, doivent contenir les mêmes informations que le livre-journal lorsque l’entreprise n’utilise pas de journaux auxiliaires).

  • Un grand-livre

Le grand livre reprend toutes les écritures du livre-journal mais celles-ci sont regroupées selon le plan de comptes utilisé par l’entreprise. Il permet de suivre les comptes de l’entreprise (solde de début, mouvement intervenus pendant l’exercice et solde de fin). Le total des écritures du grand-livre doit être égal à  celui des écritures du livre-journal. Le grand-livre peut également être détaillé en autant de grands-livres auxiliaires que souhaités. Une centralisation mensuelle peut également être appliquée.

Avant le 1er janvier 2016, le livre d’inventaire faisait également partie des livres comptables obligatoires. Il regroupait les éléments d’actif et de passif recensés lors de l’inventaire. Pour les sociétés commerciales tenues de déposer leurs comptes annuels au greffe, le livre d’inventaire devait contenir un regroupement des données d’inventaire (balance). Pour celles qui ne l’étaient pas, les comptes annuels devaient être retranscrits également (bilan, compte de résultat et annexe).

Tenue de la comptabilité des sociétés commerciales

Facturation des sociétés commerciales

Les sociétés commerciales doivent faire des factures sous certaines conditions et notamment lorsqu’elles réalisent une activité économique avec un autre professionnel.

La facture doit être remise au client dès que la vente a été réalisée ou dès que la prestation a été effectuée. Elle doit comprendre de nombreuses mentions, dont :

  • L’identification du vendeur ou du prestataire et du client (forme, siège social, RCS, ville, capital social),
  • Le numéro individuel d’identification à la TVA de la société,
  • Le numéro de la facture (attention, la numérotation des factures obéit à des règles particulières),
  • La date d’établissement de la facture,
  • La date de réalisation la vente ou de la prestation de services,
  • La quantité, le prix unitaire, les réductions et le prix total hors taxes,
  • Le taux de TVA applicable et le montant de TVA à payer,
  • Les conditions de paiement,
  • Les conditions d’escompte applicable en cas de règlement anticipé,
  • Les pénalités de retard applicables,
  • Le montant de l’indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement.

Saisie de la comptabilité des sociétés commerciales

En principe, les sociétés commerciales doivent enregistrer tous les mouvements qui affectent leur patrimoine, et ce quelles que soient leur origine (un tiers, un client, un fournisseur, une administration…) ou leur nature (exceptionnelle, financière ou d’exploitation…). Tout enregistrement comptable doit préciser l’origine, le contenu et l’imputation de chaque mouvement, et également les références de la pièce justificative qui l’appuie.

La saisie des pièces justificatives doit être faite dans le respect des dispositions de la comptabilité d’engagement : les opérations doivent être comptabilisées indépendamment de leur dénouement financier. Ainsi, les ventes et les achats doivent être enregistrés à la date de facture, tandis que leur règlement doit être comptabilisé à la date de paiement. Ce principe fait naître des créances et des dettes à la clôture de l’exercice.

Toutefois, les petites sociétés commerciales peuvent bénéficier d’une dérogation afin de limiter l’ampleur et le coût de leur comptabilité. Seules les sociétés relevant du régime du réel simplifié d’imposition peuvent d’opter pour la comptabilité super simplifiée, c’est-à-dire celles dont le chiffre d’affaires ne dépasse pas 818 000 euros pour les activités de négoce, de ventes de fournitures et de denrées à consommer sur place ou à emporter et pour les fournitures de logement ou 247 000 euros pour les prestations de services. [base 2020-2022] La dérogation consiste ici à appliquer les règles de la comptabilité de trésorerie tout au long de l’exercice et n’appliquer les règles de la comptabilité d’engagement qu’à la clôture de l’exercice. Elle permet de limiter le volume des écritures comptables et donc de gagner du temps. Pour plus d’informations à ce sujet : comptabilité d’engagement ou comptabilité de trésorerie ?

Réalisation d’un inventaire annuel

Au moins une fois par an, les sociétés commerciales doivent effectuer un inventaire permettant de contrôler physiquement l’existence et la valeur des éléments d’actif et de passif de leur patrimoine. Ces travaux d’inventaire sont réalisés à l’occasion de l’arrêté des comptes et de la clôture de l’exercice comptable.

Il s’agit notamment de réaliser un inventaire physique des stocks (puis de les évaluer), de recenser les immobilisations présentes dans l’entreprise, de vérifier les comptes de tiers (et d’identifier d’éventuelles créances douteuses à provisionner), de rechercher la présence de certains risques et d’ajuster certains postes du bilan et du compte de résultat (procédures de cut-off) …

Établissement et dépôt des comptes annuels de sociétés commerciales

Composition des comptes annuels des sociétés commerciales

Chaque année, et, dans des délais bien précis, les sociétés commerciales doivent établir des comptes annuels. Ces états financiers sont composés :

  • D’un bilan : il décrit, d’un coté, les éléments actifs et, de l’autre, les éléments passifs de l’entreprise ;
  • D’un compte de résultat : il récapitule les produits et les charges de l’exercice sans tenir compte de la date de leur dénouement financier et fait apparaître le résultat net comptable ;
  • D’une annexe : elle complète et commente les informations contenues dans le bilan et le compte de résultat.

Il existe différentes modalités de présentation des comptes annuels en fonction de la taille de la société (micro, petite ou normale). Elles sont récapitulées dans le tableau suivant :

Type de sociétéBilan et compte de résultatAnnexe
Micro-société
(société commerciale ne dépassant pas 2 des 3 seuils suivants : total bilan ≤ 350 000 €, total chiffre d’affaires ≤ 700 000 €, salariés ≤ 10)
Simplifiés (présentation abrégée du PCG)Dispense d’annexe
Petite société
(société commerciale ne dépassant pas 2 des 3 seuils suivants : total bilan ≤ 6 000 000 €, total chiffre d’affaires ≤ 12 000 000 €, salariés ≤ 50)
Simplifiés (présentation abrégée du PCG)Annexe abrégée (si soumission au régime du réel simplifié)
Annexe simplifiée (si soumission au régime du réel normal)
Moyenne société
(société commerciale ne dépassant pas 2 des 3 seuils suivants : total bilan ≤ 20 000 000 €, total chiffre d’affaires ≤ 40 000 000 €, salariés ≤ 250)
Bilan de base
Compte de résultat simplifié
Annexe abrégée (si soumission au régime du réel simplifié)
Annexe de base (si soumission au régime du réel normal)
Société de taille normale
(société commerciale dépassant 2 des 3 seuils suivants : total bilan > 20 000 000 €, total chiffre d’affaires > 40 000 000 €, salariés > 250)
De base (sauf option pour le système développé)Annexe abrégée (si soumission au régime du réel simplifié)
Annexe de base (si soumission au régime du réel normal)

Attention, ces allègements ne peuvent bénéficier aux sociétés exerçant certaines activités (établissements bancaires, assurances et mutuelles, sociétés cotées et organismes faisant appel à la générosité publique…).

Publicité des comptes annuels des sociétés commerciales

Toutes les sociétés commerciales doivent déposer leurs comptes annuels (ainsi que certains autres documents comment la résolution d’affectation du résultat proposée et adoptée et le rapport du commissaire aux comptes s’il existe) au greffe du tribunal de commerce, chaque année. En général, le délai est fixé à un mois suivant la date d’approbation. Il est porté à deux mois pour les dépôts effectués par voie électronique.

Dès qu’il les reçoit, le greffier du tribunal de commerce va publier une annonce spéciale au bulletin officiel des annonces civiles et commerciales (BODACC). Les comptes seront, de ce fait, rendus publics et seront accessibles à toute personne qui en fait la demande.

Toutefois, les micro-sociétés respectant les seuils présentés ci-dessus peuvent demander la non publication de leurs comptes annuels, si elles n’appartiennent pas à un groupe et n’exercent pas une activité expressément exclue par la Loi. Les petites sociétés commerciales peuvent, quant à elles, demander à ce que le compte de résultat soit confidentiel (le bilan reste consultable par tout intéressé). Pour bénéficier de cette mesure, les sociétés commerciales doivent joindre à leur dépôt une déclaration de confidentialité.

Conclusion : les sociétés commerciales sont astreintes aux obligations comptables les plus étendues. Elles peuvent toutefois bénéficier de certains allègements.

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Ecrit par
Thibaut Clermont

Thibaut CLERMONT, mémorialiste en expertise-comptable et fondateur de Compta-Facile, site d'information sur la comptabilité.

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